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Coûts et ratios de construction 2022

Depuis sa création en 1983, l’ADRC étudie le coût des projets soutenus par la Commission d’Aide Sélective à la Petite et Moyenne Exploitation. Cet échantillon, représentatif de l’évolution nationale, prend en compte les estimations prévisionnelles présentées par les opérateurs (privés, publics, associatifs) et maîtres d’œuvre.

Afin d’analyser le coût d’un projet, sont utilisés différents indices et en particulier, le ratio au fauteuil basé sur le coût des travaux. Le montant du lot « divers et honoraires » (honoraires de maîtrise d’œuvre, étude de marché, bureau de contrôle, assurances, etc.) varie selon le contexte de chaque projet. Sa proportion peut varier entre 10 et 20 % du montant (HT) de l’opération, selon le niveau de complexité et la nature de la maîtrise d’ouvrage. Les ratios (au fauteuil et au m²) excluent le lot « divers et honoraires » et les équipements cinématographiques (image, son, écran) car ils sont indépendants de la capacité ou la surface de l’établissement. Le ratio au fauteuil doit être mis en perspective avec d’autres paramètres, notamment le coût médian des opérations (prenant en compte les effets de seuil) et le coût au m², ratio généralement utilisé dans le secteur de la construction. 

Ces indices permettent de définir un « coût d’objectif théorique », mais l’estimation du coût ne saurait ignorer le contexte dans lequel s’insère le projet dans ses multiples dimensions : foncière, technique, patrimoniale, urbanistique et réglementaire. 

Évolution des indices 

L’année 2022 marque la première année complète d’exploitation pour les cinémas, après les fermetures successives dues à la pandémie mondiale du coronavirus SARS-CoV-2. Progressivement, l’épidémie faiblit, ce qui se traduit par l’assouplissement des mesures sanitaires, mettant fin en particulier au pass vaccinal à compter du 14 mars 2022. On note ainsi une reprise avec un total d’entrées à 152 millions, soit une augmentation de 59,2 % par rapport à 2021. Le nombre de cinémas en France se maintient à 2.061 établissements actifs (+ 32 par rapport à 2021) pour un total de 6.298 écrans (+ 107 par rapport à l’année précédente), selon les données du CNC.

Malgré le déclenchement de la guerre en Ukraine en février, l’année 2022 apparaît comme une bonne année pour le secteur du bâtiment, dont l’activité croît de 3,7 % en volume. L’activité du non résidentiel neuf progresse de 6,1 % sur cette période, ce qui est supérieur aux prévisions faites fin 2021. Toutefois, le niveau d’activité reste de 5,3 % en deçà de 2019. En nombre de projets, les commerces sont un des principaux facteurs en progression (+ 13,1 %). On note également que les surfaces mises en chantier de bâtiments non résidentiel neufs connaissent une rapide progression de 4,9 %, avec 26,3 millions de m² commencés en 2022 (5,4 millions de m² en deçà de la moyenne calculée depuis 1986).
Les améliorations-entretiens se limitent à 2,1 % d’augmentation et retrouvent quasiment leur niveau de 2019. La rénovation énergétique ressort comme aussi dynamique que l’ensemble (+ 2,8 % en volume). Elle s’avère principalement portée par le non résidentiel, grâce au programme de rénovation énergétique des bâtiments publics « France Relance ». Le conflit ukrainien (et la crise énergétique qui s’en est suivie) a provoqué un réel choc inflationniste, et l’année se solde sur une hausse moyenne des prix à la consommation d’un peu plus de 5%. Selon la Fédération Française du Bâtiment, le pic inflationniste reste à venir, au fur et à mesure de la transmission de l’envolée de l’énergie aux autres secteurs.

 

Evolution du nombre de projets, des investissements et du coût moyen des projets soutenus par la commission d’Aide Sélective du CNC depuis 1995

Le nombre de projets soutenus par la Commission d’Aide Sélective à la Petite et la Moyenne Exploitation du CNC est en baisse relative avec 25 projets en 2022 (26 l’année précédente) alors que sur les dix dernières années, la Commission soutenait une moyenne de 39 projets par an. Cette diminution légère montre l’impact de la pandémie. Toutefois, malgré une hausse d’activité globale du secteur du bâtiment, notamment grâce au « non résidentiel » neuf, les opérations liées aux équipements cinématographiques n’ont que peu bénéficié de cette reprise. Il est à noter que la diminution des projets soutenus ralentit (- 10,34 % entre 2020 et 2021 contre - 3,84 % entre 2021 et 2022).

Avec moins de projets soutenus, les investissements en Euros constants sont encore une fois, en baisse. On observe une chute de 9,39 %, passant de 66 millions d’Euros investis en 2021 à 59,8 millions d’Euros en 2022. Ainsi, la diminution des investissements semble se poursuivre, bien que légèrement ralentie (on calculait - 13,3 % entre 2020 et 2021).

A partir de 2015, le secteur a connu une augmentation conséquente des prix des projets, allant jusqu’à un record de 94,4 millions d’Euros investis en 2019. Depuis la crise sanitaire, le nombre de projets soutenus et les investissements sont en baisse. Le prix moyen par projet diminue légèrement : 2,39 millions d’Euros en 2022 contre 2,54 millions d’Euros en 2021.

A titre de comparaison, il était de 870 k€ en 2015. Cette baisse est due au nombre de projets qui reste globalement stable alors que les investissements continuent de diminuer. Pour autant, ces évolutions sont minimes et montrent une stabilisation de l’indice après les records atteints en 2019 et les crises qui s’en suivirent.

Les conséquences de la crise sanitaire sont maintenant connues, avec une augmentation conséquente des coûts de construction. Cela s’explique notamment par la forte demande qui a suivi les arrêts de production durant les différents confinements. Ainsi, en 2021, l’indice du coût de la construction, calculé par l’INSEE, avait augmenté de 5,07 %. Sur l’année 2022, le même indice continue sa progression (+ 8,8 % sur l’année). Cela s’explique par les conséquences conjuguées de la crise sanitaire, du conflit ukrainien et du contexte inflationniste. Selon la FFB, cette évolution devrait continuer en 2023, lorsque les nouveaux contrats de fourniture d’énergie entreront en vigueur. Ainsi, il est à prévoir que les évolutions mentionnées plus haut se poursuivront l’année prochaine.

Concernant les projets les plus lourds en investissement (créations et adjonctions), on observe un déséquilibre entre le nombre de projets privés et publics. Il est rare que cette situation se présente hors période d’élections municipales. En 2022, sur 10 projets structurants, seulement 2 sont portés par une maitrise d’ouvrage publique. L’an dernier, la répartition était à peu près égale, avec 6 projets publics et 7 privés. Cela s’explique de plusieurs manières. Tout d’abord, la baisse, déjà enclenchée depuis plusieurs années des adjonctions simples, passant de 10 en 2017 à 4 en 2021 et 1 seulement en 2022. Cela s’explique également par l’augmentation générale des coûts de construction, qui a mis à l’arrêt plusieurs projets portés par des collectivités, phénomène moins marqué dans le cas de maitrise d’ouvrage privées. Le nombre de projets portés par ces dernières continue de se maintenir, malgré les périodes inflationnistes traversées par le secteur de la construction.

Les indices de coût de construction (notamment l’indice FFB pris comme référence) étaient stables depuis quelques années (+ 0,6 % entre 2019 et 2020). Suite à la pandémie, l’année 2021 avait vu les indices augmenter de 6,6 %, et on retrouve cette même augmentation en 2022. A contrario, pour les projets soutenus par le CNC, la progression des ratios (indice base 1984), après une légère hausse en 2021 (+ 1,45 %) baisse fortement en 2022 (- 16,8 %). Ainsi, les coûts de construction dans le secteur cinématographique diminuent, contrairement au reste de la filière qui subit l’inflation générale. Cela peut s’expliquer par un échantillon plus réduit, notamment de projets publics et donc moins représentatif des prix de la filière, ainsi que de l’évolution des typologies de projets soutenus.

Il y a toujours des variables suivant les modes d’exploitation, mais qui s’atténuent par le retour des projets privés vers le centre-ville et la prise en compte de contraintes urbanistiques, d’articulation avec les collectivités et d’objectifs de qualité (accessibilité, développement durable). La diminution du nombre de projets publics a également un impact fort sur la baisse des ratios.

Après une augmentation en 2021 (+ 40,2 %) le prix médian au fauteuil des créations diminue de 35,59 % en 2022. Les projets ayant les valeurs les plus hautes (dites plafond) suivent une baisse plus légère (- 17,69 %). Ces chiffres nous permettent de mieux définir les évolutions du marché mais restent relatifs, en raison du faible nombre de projets soutenus en 2022. L’échantillon présente un nombre important de projets plus simples et moins onéreux, ainsi le prix médian baisse fortement. Les conséquences des différentes crises se font réellement sentir : les projets les plus chers diminuent pour la première fois depuis 2018.

Les ratios surfaciques (au m²) suivent la même tendance. Les valeurs plafonds diminuent de 16,34 % tandis que les valeurs planchers diminuent de 30,65 %, retrouvant le même niveau qu’entre 2014 et 2020.

Ainsi, les ratios des projets diminuent globalement. Pour la première fois depuis la crise sanitaire, les projets les plus chers sont également impactés, mettant un point d’arrêt à la dynamique d’augmentation que nous observions depuis une dizaine d’années.
En 2021 nous relevions que le delta entre les prix médians et les prix plafonds se comblait. Cette année, il retrouve à peu près le même écart qu’en 2020. L’année 2021 était exceptionnelle au regard des hausses des prix, l’année 2022 semble retrouver des valeurs plus habituelles. En effet, les valeurs plafonds de 2022 sont au même niveau que les valeurs planchers de 2021.
Le coût moyen par projet évolue peu (- 3,8 % en 2022). Cette stabilité, conjuguée aux baisses des différents ratios, démontre une diminution du nombre de projets dits lourds au profit d’opérations plus légères, pour lesquelles les objectifs qualitatifs, environnementaux et les contraintes urbanistiques sont toujours autant d’actualité. Les conséquences de la crise sanitaire vont maintenant laisser place à celles du conflit ukrainien et la logique voudrait que la dynamique de baisse s’inverse pour l’année 2023.

Les crises traversées continuent d’impacter le nombre de projets soutenus (- 3,84 % en 2022) qui n’a jamais été aussi bas.
On peut cependant noter que cette diminution semble atteindre un palier autour de 25 projets. Comme vu précédemment, les investissements diminuent également (- 9,39 % en 2022). Ces derniers sont légèrement inférieurs à ceux de 2016, année où la Commission avait soutenu 46 projets (contre 25 en 2022). Bien qu’en diminution, cette valeur reste forte par rapport à un nombre de projets soutenus en forte baisse.
En 2020, la part des projets coûteux et complexes était prépondérante. En 2021 et maintenant en 2022, les difficultés économiques empêchent certaines maitrises d’ouvrage de mener à terme des projets ambitieux. Ainsi on dénombre, cette année encore, une baisse de la proportion des projets structurants pour une augmentation des opérations plus simples. L’an dernier, cette baisse n’était pas encore assez importante pour enrayer l’inflation. En 2022, la poursuite de cette dynamique permet d’expliquer en partie la baisse des ratios.

Évolution des ratios

Sur l’année 2022, les proportions des différentes typologies de projets évoluent. Le nombre de créations reste stable. On compte le même nombre d’opérations (9) en 2022 qu’en 2021, pour environ un tiers des projets. Après le recul en 2020 lié aux élections municipales et aux périodes de confinement, la proportion de créations semble se maintenir depuis quelques années. Il convient de préciser que la typologie « création » est utilisée ici dans un sens architectural et comprend les transferts de cinéma sur un nouveau site, même si ces derniers disposent déjà d’une autorisation d’exercice par le CNC.
La proportion de projets structurants (créations ex nihilo et adjonctions de salles) diminue cette année (40 % contre 50 % en 2021). Les adjonctions sont en baisse drastique avec une part de 4 % contre 15 % en 2021 et 24 % en 2020. Bien que ces années soient marquées d’un contexte économique particulier, il est à noter que les projets soutenus concernent de moins en moins une « simple » adjonction de salle. On retrouve de plus en plus ces extensions dans des projets ambitieux de transfert-extension ou de restructuration globale. Cela s’explique par les contraintes urbaines et architecturales conséquentes lors de l’agrandissement d’un cinéma de centre-ville notamment.

Bien qu’en baisse, la proportion de projets structurants continue d’être prépondérante, mais en son sein, la répartition évolue. Les créations se maintiennent à un niveau assez faible et les adjonctions diminuent. En parallèle, on observe une augmentation des réhabilitations (28 % contre 11,5 % en 2021). Avec des objectifs de développement durable et de réduction des coûts, il est logique de voir cette typologie prendre de l’importance. En effet, dans une optique de modération foncière, il est plus écologique de réaménager un bâtiment existant que d’en construire un nouveau. De plus, lorsque les maitrises d’ouvrage parviennent à utiliser un bâtiment existant qui fait déjà partie de leur parc immobilier, les investissements diminuent de facto. Il est probable que les années à venir vont voir augmenter la part d’opérations de ce type, également utiles dans une optique de renouvellement urbain.

Les années précédentes étaient marquées par les transformations de la petite exploitation qui, pour répondre aux évolutions de la diffusion tout en maintenant la diversité de l’offre, nécessitait la création d’écrans supplémentaires. On observe aujourd’hui une évolution avec une volonté de créer des halls à même d’accueillir des animations, des espaces d’éducation à l’image, ou encore de simples lieux de convivialité. Cette évolution de l’exploitation, conjuguée à une diminution des projets conséquents se traduit par une augmentation des projets in-situ. Le nombre de rénovations augmente légèrement, passant de 3 en 2021 à 4 en 2022, représentant 16 % des projets soutenus. Les améliorations (projets les plus simples sans enjeu structurant) diminuent : 4 en 2022 contre 7 en 2021. Les projets au sein de cette typologie restent très variés et leur faible nombre rend le calcul de ratios peu pertinent.

Échantillon 2022

Comme mentionné précédemment, l’année 2022 a vu les investissements continuer à baisser et les ratios ont suivi cette dynamique (- 35,6 % pour le ratio au fauteuil et - 30,7 % pour le ratio surfacique). Les valeurs plafonds des projets les plus onéreux diminuent également (- 17,7 % au fauteuil et - 16,3 % au m²). Ainsi, les projets coûteux sont impactés par les crises économiques, de manière moindre que les rénovations, augmentant la différence entre ces deux typologies qui s’était réduite l’année précédente.

 

Créations

Le nombre de créations reste stable (36 % des projets), mais on observe une évolution franche des coûts médians. Pour les projets avec des opérateurs privés ou mixtes, le coût médian passe de 7,4 millions (2021) à 4,9 millions d’Euros, soit une diminution sensible de - 34 %. En parallèle, les ratios de cette typologie diminuent mais de manière moins importante (- 25 % au fauteuil ; - 11 % au m²). L’échantillon 2021 comptait six opérations privées dont le coût était supérieur à 5 millions d’Euros. En 2022, seulement 4 opérations (sur 7) ont un coût supérieur à 4 millions d’Euros. Les projets entrepris à la suite de la crise sont moins onéreux. On peut citer le cinéma Grand Ecran à Montaigu-Vendée, nouveau complexe de 6 écrans (près de 900 fauteuils), qui s’implante sur le site du cinéma existant, dans une opération de réaménagement du centre urbain. Les ratios (4.600 €/fauteuil et 1.800 €/m²) sont cohérents au regard de l’année 2022, mais sont faibles par rapport à 2021. Cela s’explique par une plus grande volonté d’économie, dans un contexte instable.

D’un autre côté, les opérations publiques sont seulement au nombre de 2 cette année (contre 3 en 2021). Le coût médian augmente fortement (+ 41 %) alors que les ratios subissent quant à eux, une baisse de 20 % au fauteuil et de 22 % au m². Un échantillon aussi réduit produit nécessairement une analyse peu représentative. On observe une recrudescence de portages mixtes (privés et publics), dans le cadre de vastes opérations immobilières. Le plus souvent, des promoteurs privés prennent en charge la partie gros-oeuvre, ensuite revendue à la collectivité pour la suite de l’aménagement. Cela produit des montages financiers complexes dont les coûts liés à la structure du bâtiment ne sont pas présentés en commission. C’est le cas par exemple du projet du Concorde à La Roche sur Yon (transfert extension du cinéma existant) au sein d’un bâtiment à vocation multiple (logements, hôtel, cinéma) qui passe de 2 à 4 écrans pour un total de 450 fauteuils. Les ratios sont d’environ 4.200 €/fauteuil et 1.300 €/m², hors gros oeuvre, ce qui représente souvent 40 à 50 % du montant global. On imagine aisément comment ce type
d’opération impacte les ratios.

Pour finir, il est à noter que la variation de coût entre projets privés et publics continue de se réduire.

Restructurations

Le nombre de lourdes opérations de restructuration (adjonctions et réhabilitations) reste à peu près stable cette année (8 projets contre 7 en 2021). Pour autant, l’échantillon 2022 contient une unique adjonction et 7 réhabilitations (contre respectivement 4 et 3 en 2021). Il est intéressant de noter que la quasi-disparition des adjonctions se fait notamment au profit des réhabilitations et provoque de facto une augmentation forte des ratios des restructurations : + 120 % au fauteuil et + 60 % au m². De la même manière, le cout médian augmente de 40 %. Ainsi, les chiffres de ces opérations parviennent au même niveau que ceux d’une création.

L’échantillon d’adjonctions strictes dont le nombre ne cesse de diminuer (une seule en 2022 ; 4 en 2021), n’est pas suffisamment représentatif. Cette unique opération est l’ajout d’une salle au cinéma Le Brady, situé dans le 10ème arrondissement de Paris. Ce nouvel espace s’insère dans des locaux existants, anciennement dédiés au théâtre (loges, coulisses). En plus d’être la seule adjonction de l’année, c’est également une opération particulière, marquée par des contraintes urbaines et architecturales très fortes. On notera que le coût de cette opération (600 K€) est deux fois plus faible que le coût médian des adjonctions en 2021, alors que les ratios sont largement supérieurs : 3.800 €/fauteuil (+ 58 % par rapport à 2021) et 2.200 €/m² (+ 21 % par rapport à 2021). C’est une opération complexe pour une salle très réduite de seulement 39 places. Cet exemple est très révélateur des évolutions qui impactent la petite exploitation qui cherche à ajouter des écrans dans un but de diversification de la programmation et de l’exposition des films, le tout dans un tissu urbain souvent contraint.

Comme on l’a vu, les réhabilitations sont en hausse cette année et les augmentations des coûts suivent cette dynamique. Le coût médian augmente de 66 %, signe que les projets sont de plus en plus complexes et onéreux. Le ratio au fauteuil augmente de 120 % dépassant les ratios des créations, tout comme les ratios surfaciques qui augmentent eux de 84 %. Il est à noter que l’échantillon, bien qu’en hausse, n’est pas entièrement représentatif du marché. En effet, on note des disparités dans les coûts (rapport de 1 à 7 entre les projets extrêmes), ce qui se répercute sur les ratios. On peut illustrer ces tendances avec deux exemples : Le Méliès de Pau et l’Entracte de Vagney. Le premier est une opération emblématique, par le transfert avec extension du cinéma existant dans l’ancien marché aux bestiaux du quartier du Foirail. Les interventions structurelles sont lourdes pour y loger cet équipement de 3 salles et 500 fauteuils. De plus, l’aval des Architectes des Bâtiments de France est nécessaire à chaque étape pour la transformation de ce bâtiment des années 1930. Le ratio au fauteuil est important (6.500 €/fauteuil) mais reste adapté compte tenu des contraintes structurelles. Le ratio surfacique (2.500 €/m²) se situe dans les moyennes, un cinéma relativement compact. D’un autre côté, on trouve la réhabilitation du mono-écran existant de Vagney. Cet équipement de proximité est situé dans le centre-bourg de cette commune de 4.000 habitants. Le cinéma est vétuste et très peu visible depuis l’espace public. Cette opération d’envergure propose une nouvelle écriture, notamment avec un fort travail de toiture, pour transformer l’existant en un bâtiment signal avec le confort d’une exploitation moderne. Ainsi, on note des ratios importants (8.200 €/fauteuil et 2.300 €/m²), ce qui s’explique par une faible capacité (156 fauteuils) mais avec un véritable effort sur les espaces d’accueil (3,7 m²/spectateur). Ces opérations tirent parti de l’existant et participent à redynamiser les centres urbains. Ce sont des opérations coûteuses, mais dont la plus-value se ressent à l’échelle du territoire.

Les typologies les plus coûteuses (créations et restructurations) restent à un niveau important, totalisant 56 % des projets pour 84 % des investissements (61 % des projets pour 96 % des investissements en 2021). Toutefois, l’importance des projets coûteux diminue quand la part d’investissement dans les projets de rénovation, moins chers et en phase avec les difficultés économiques actuelles, augmente. La différence entre les coûts plafonds et planchers des créations était de 1 pour 10 en 2021, quand elle atteint difficilement 1 pour 3 cette année. La course aux projets structurants et coûteux marque un véritable coup d’arrêt.

Rénovations

Concernant les rénovations, l’échantillon est sensiblement équivalent cette année (4 contre 3 en 2021), pour autant, les ratios évoluent différemment. Le coût au fauteuil augmente de 33 %. Le ratio surfacique diminue lui de 30 % quand le coût médian progresse de 75 %. L’amplitude entre les valeurs extrêmes des différents projets reprend sa hausse (du simple au double), montrant l’hétérogénéité des projets soutenus. Ces évolutions sont à relativiser compte tenu du faible échantillon de 2022.

Le nombre de modernisations légères diminue, passant de 7 à 4. Les projets soutenus sont toujours aussi éclectiques, entre une rénovation des espaces d’accueil pour 50 K€ et une véritable extension du hall et création d’espaces d’animations pour 8 fois cette somme. Ces variations de projets rendent les ratios peu pertinents pour cette catégorie.

 

Evolution des ratios 2022

Conclusion

En conclusion, la progression des ratios qui avait augmenté à la suite de la crise sanitaire marque un vrai coup d’arrêt, notamment pour les projets conséquents. Ces derniers ont atteint un plafond en 2021 et entament maintenant un ralentissement. Les projets structurants sont la cible d’économies, parfois au détriment du confort, avec plus de compacité et des ratios de surface par spectateur qui tendent à diminuer. Les ratios subissent donc une baisse globale, mais restent à un niveau élevé, signe que la mise en accessibilité des établissements ainsi que les démarches environnementales sont toujours des objectifs pour les porteurs de projets. A l’heure actuelle, il est nécessaire d’articuler un projet entre qualité et économie. Le nombre de projets diminue légèrement, restant à un niveau bas inédit, conséquence de la crise. En effet, plusieurs projets ont été mis à l’arrêt suite à l’inflation des coûts des matières premières. Les conséquences à venir du conflit ukrainien devraient poursuivre cette tendance.

On observe toujours des projets structurants, créations ou réhabilitations lourdes, pour répondre aux exigences de la diffusion des films ainsi qu’aux attentes du public en matière d’accueil et d’animation. Ces derniers points deviennent particulièrement importants après les périodes de confinement, pour le retour du public dans les salles. La reprise plus importante dans les établissements de proximité avec un public fidélisé par une politique d’animation ciblée l’illustre parfaitement. Le retour des exploitants privés en centre-ville se poursuit et implique des ratios élevés car ces projets sont souvent plus contraints. De plus, la part importante de réhabilitation montre l’intérêt grandissant porté au bâti existant, dans une optique de renouvellement de ces centres urbains.

Les investissements se concentrent toujours sur les opérations lourdes, bien qu’en relatif ralentissement. Bien qu’en baisse, les ratios élevés sont révélateurs d’opérations concernant des cinémas aux surfaces réduites et néanmoins fortement contraints. Il est intéressant de noter que si les coûts des créations diminuent, ceux des réhabilitations et rénovations augmentent, signe de l’importance grandissante de projets plus qualitatifs dans ces catégories.

L’équilibre se creuse à nouveau entre les projets d’initiative publique et privée. Cela s’explique par des difficultés, pour les collectivités, à trouver des financements pour des projets importants. Ainsi, la différence de coût entre projets publics et privés tend à s’équilibrer (à remettre dans le contexte du faible échantillon de créations publiques).
On observe également une recrudescence de projets portés conjointement par ces deux maitrises d’ouvrages. Dans ces derniers cas, l’absence de gros oeuvre, dans les demandes d’Aide Sélective, sur ces projets participe également à la baisse des coûts des créations.

Globalement l’année 2022 restera marquée par un échantillon réduit, avec des projets variés, illustrant les changements dans le renouvellement du parc cinématographique français. La croissance du secteur a progressé avant de subir un nouveau coup d’arrêt à la suite du conflit ukrainien dont les conséquences, notamment au niveau énergétique, se répercuteront encore en 2023.

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