Faisons un rêve
Un couple se rend chez un ami, celui-ci est en retard. Le mari s’impatiente et part en prétextant un rendez-vous. L’ami fait enfin son apparition et séduit la jeune femme restée seule. Au matin, celle-ci est affolée de ne pas être rentrée chez elle. Mais voilà le mari qui réapparaît, il a également découché et ne sachant que raconter à sa femme, il vient demander conseil à son ami. Ce dernier réussira alors à l’éloigner deux jours de plus.
Génie de Guitry, inventeur méconnu, avec Pagnol, du cinéma parlant à la française, un cinéma qu'on ne se lasse pas de redécouvrir. Faisons un rêve (1936), le film le plus tendrement misogyne et le plus speed de l'histoire du cinéma, a d'abord été une pièce. Écrite en quatre jours (d'avril 1916), une poignée d'années avant les records de vitesse d'un certain Georges Simenon. Manque dans le film le quatrième acte, joliment triste, où l'héroïne écrivait une lettre de rupture à son amant, qu'elle renonçait au dernier moment à envoyer. C'est un texte élégant et mélancolique, le seul long monologue féminin de toute l'œuvre de Guitry. On se contentera des trois autres actes, de leurs mots doux et de leurs images swinguantes, idéalement servis par l'antinaturalisme radical de Guitry et la légèreté de Jacqueline Delubac.
Libération – Louis Skorecki