Les Sièges de l'Alcazar
Paris, 1955. Guy, critique aux Cahiers du cinéma, va souvent voir les films de Vittorio Cottafavi dans une salle de quartier. Il y aperçoit Jeanne, critique de la revue ennemie Positif, qui semble le suivre.
Ancien critique pour les Cahiers du Cinéma, Luc Moullet avait déjà mis en scène son précédent métier dans Un steack trop cuit, son premier film, où il prenait les traits de Jean-Luc Godard pour un caméo drolatique. Presque trente ans plus tard, Les Sièges de l'Alcazar vient combler son désir d'évoquer encore et toujours le cinéma dans la ferveur de ses débats, mais aussi la relative complexité de ses codes. Par l'histoire d'amour impossible entre deux critiques – l'un engagé aux Cahiers du cinéma, l'autre à Positif –, le film raconte le conflit de revues aux lignes éditoriales opposées, lancées dans une guerre des nerfs sans merci. Alors qu'il transforme la salle de cinéma en lieu hors du temps où tout semble réalisable, Luc Moullet égratigne avec tendresse les rituels de cinéphiles confrontés à la bataille des placements, à l'euphorie des confiseries et aux pellicules défectueuses. À l'écran, son alter ego devient tantôt aventureux et exubérant, tantôt renfermé et obtus, si bien que le cinéaste n'emprunte jamais le chemin aisé de la condescendance pour privilégier la subtilité et l'empathie.