Un matin d'avril, dans la banlieue bruxelloise, Charles Régnier, à la suite d'une trop forte absorption de drogue, brutalise sa femme, Hélène, puis envoie leur enfant de quatre ans s'écraser contre le mur …

Stéphane Audran n’a jamais été aussi forte dans un Chabrol : elle porte le film sur ses épaules de la première à la dernière image, n’ayant autour d’elle que des comparses même de talent. Hélène est une sainte – « Sainte-Hélène » s’amuse Paul Thomas (Jean-Pierre Cassel), mi-méprisant, mi-admiratif -, incarnant la vertu incorruptible, douée d’une énergie qui confine à l’entêtement (…) Elle est seule face aux riches, combattant le complot des corrompus, des pervers, et la grande manipulation des âmes innocentes. Hélène démontre que l’argent ne peut pas tout. D’origine modeste et populaire, elle ne possède pas la culture ni les mots pour se défendre, mais elle forge son destin à la force de sa volonté : c’est une « bonne femme », qui reprend la Ginette de 1960 – elle aussi est danseuse de Cabaret – mais ayant muri, s’étant aguerrie devant les épreuves de la vie. L’actrice a souhaité le personnage comme cela ; le scénariste et le metteur en scène Chabrol le lui a offert. La Rupture marque l’acmé de leur collaboration professionnelle et de leur vie commune – c’est un chant du cygne mais ils n’en n’ont pas conscience à ce moment. Ce personnage correspond à l’engagement féministe de Stéphane Audran, plutôt prudente auparavant.

Antoine de Baecque, Chabrol, Stock (2021)