À la fin du Moyen-Âge, deux ménestrels, Gilles et Dominique, sont envoyés dans un château par le Diable en personne, pour y apporter le désespoir.

Conçu et partiellement tourné en zone libre, dans le Midi de la France, où Prévert a élu résidence et où le décorateur juif Alexandre Trauner doit travailler dans la clandestinité, Les Visiteurs du soir est un conte médiéval dont l’inspiration visuelle est le manuscrit enluminé des Très Riches Heures du duc de Berry. Les contraintes de la période amènent Carné et son équipe à faire des prodiges pour que le film garde l’allure d’une grosse production ; les accessoiristes doivent vernir les victuailles du banquet pour éviter que les figurants affamés ne les dévorent (parmi lesquels Simone Signoret, très identifiable, et Alain Resnais). Discuté pour le rythme hiératique de sa première partie, et pour l’emphase de certains dialogues, le film est un fascinant mélange de féerie rêveuse et d’humour sardonique, où excellent particulièrement Jules Berry et Arletty, dans un génial contre-emploi. Les chansons de Prévert (musique de Maurice Thiriet) contribuèrent à en faire l’un des films les plus populaires de l’époque (...) 

N. T. Binh