Ordet
En 1930, dans un village du Jutland. Morten Borgen exploite ses terres avec l’aide de ses trois fils. L’aîné, Mikkel, est marié et sa femme Inger est sur le point d’accoucher. Johannes, le second, est un illuminé qui se prend pour le Christ et parcourt la campagne en prophétisant. Anders, le plus jeune, est amoureux d’Anne, mais son père s’oppose à leur union pour des raisons de dissensions religieuses…
Rien ici, fut-ce un millimètre carré de l’écran, ne paraît échapper à la volonté esthétique de l’auteur. De cette perfection, naît peu à peu une fascination irrésistible qui nous impose non seulement l’histoire la plus insolite mais le style le plus inhabituel. Ordet est – esthétiquement sinon historiquement – le dernier film en noir et blanc. Il épuise les ultimes symbolismes de la lumière sans couleur. Le paradoxe, c’est qu’Ordet soit en même temps un film d’une tendresse délicate et subtile où l’amour humain est décrit avec une vérité déchirante et qu’il puisse aussi se comparer aux meilleurs d’Hitchcock pour la maîtrise de l’attente.
André Bazin,
Radio Cinéma, 15 janvier 1956